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La Cour de l’Alberta confirme la compétence exclusive de l’arbitre du travail sur la politique de vaccination obligatoire dans les milieux de travail syndiqués

03 février 2023

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Écrit par John Gilmore, Keely Cameron and Joseph Koshan

La Cour du Banc du Roi de l’Alberta a récemment appliqué le principe de longue date selon lequel les arbitres du travail ont compétence exclusive pour trancher les différends découlant d’une convention collective, même dans le contexte de la mise en œuvre par un employeur d’une politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19 dans un milieu de travail syndiqué.

Le 25 janvier 2023, la Cour du Banc du Roi de l’Alberta a publié un décision annulant les réclamations de 28 demandeurs syndiqués contre leur employeur conformément à la règle 3.68 des Règles de la Cour de l’Alberta au motif que la Cour n’avait pas compétence pour entendre les réclamations. Bennett Jones représentait l’employeur.

Le principe de la compétence arbitrale exclusive sur les différends syndiqués en milieu de travail, connu sous le nom de « principe Weber » en raison de son articulation par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Weber c Ontario Hydro, [1995] 2 RCS 929, a été confirmé à plusieurs reprises de mémoire récente, y compris par la Cour suprême du Canada dans Northern Regional Health Authority v Horrocks, 2021 CSC 42. Toutefois, cette décision particulière est remarquable pour deux raisons :

La réclamation des demandeurs syndiqués

En juin 2022, les plaignants syndiqués, ainsi que trois employés dont l’emploi n’était pas régi par une convention collective, ont déposé une plainte civile devant la Cour du Banc du Roi de l’Alberta concernant la mise en œuvre par l’employeur de sa politique de vaccination contre la COVID-19. La déclaration plaidait des infractions à la Loi sur les droits de la personne de l’Alberta, au Code criminel, au Code des normes d’emploi et à la Loi sur la procréation assistée, et réclamait des dommages-intérêts punitifs, exemplaires et majorés, tous découlant de la mise en œuvre de la politique de vaccination contre la COVID-19.

Les demandeurs ont modifié leur déclaration en août 2022, ajoutant le gouvernement de l’Alberta en tant que défendeur, alléguant que l’employeur agissait à titre de mandataire du gouvernement dans sa mise en œuvre de la politique de vaccination contre la COVID-19 et plaidant des violations de la Charte des droits et libertés.

En novembre 2022, les demandeurs ont modifié leur déclaration pour une deuxième fois, retirant leurs réclamations en vertu du Code criminel et ajoutant des allégations d’ingérence délictuelle dans les relations économiques, d’infliction intentionnelle de souffrances mentales et de voies de fait.

Décision de la Cour : Quel que soit le cadre juridique, le caractère essentiel demeure un conflit de travail syndiqué

Dans sa décision, le juge de première instance J.R. Farrington de la Cour du Banc du Roi a convenu avec l’employeur que la Cour n’avait pas compétence pour entendre la demande et a radié la demande des demandeurs syndiqués contre l’employeur pour défaut de compétence.

Pour en arriver à cette conclusion, la Cour a réitéré que le principe de l’arrêt Weber prévaut dans ce domaine et que la considération ultime est de savoir si le caractère essentiel du différend en cause découle de la convention collective des parties. En l’espèce, des conditions ont été imposées par l’employeur aux demandeurs syndiqués, et les demandeurs syndiqués n’étaient pas d’accord avec ces conditions. Par conséquent, le caractère essentiel du conflit était de « définir les limites de l’autorité de l’employeur sur le lieu de travail et les conditions qu’il peut ou non imposer », ce qui relevait de la compétence d’un arbitre du travail.

La Cour a rejeté l’argument des demandeurs selon lequel les réclamations fondées sur la Charte et la Human Rights Act de l’Alberta ont fait en sorte que ce différend ne relève pas de la compétence exclusive d’un arbitre du travail, soulignant que les arbitres du travail en Alberta ont le pouvoir d’accorder des réparations en vertu de ces deux lois, que les tribunaux civils de la province n’ont pas compétence pour accorder des réparations en vertu de la Human Rights Act de l’Alberta, et qu’il était difficile d’envisager comment il y aurait des recours prévus par la Charte contre un employeur privé.

La Cour a également rejeté l’allégation des demandeurs selon laquelle le gouvernement de l’Alberta avait ordonné à l’employeur de mettre en œuvre la politique de vaccination contre la COVID-19, notant que la politique de vaccination contre la COVID-19 avait finalement été imposée par l’employeur, et non par la province. Selon le juge Farrington, même si la province avait imposé à l’employeur l’obligation d’imposer une politique de vaccination obligatoire, le différend des demandeurs syndiqués avec l’employeur au sujet de la mise en œuvre de cette politique serait toujours un conflit de travail et relèverait donc de la compétence exclusive d’un arbitre du travail en vertu des dispositions d’arbitrage de griefs des conventions collectives applicables.

Enfin, après avoir rejeté plusieurs autres tentatives des plaignants syndiqués de faire valoir leur demande dans le cadre d’une exception au principe de compétence exclusive de Weber, la Cour a fait remarquer que les syndicats de demandeurs syndiqués avaient déposé un grief contre la politique de vaccination contre la COVID-19 par le biais de la procédure de règlement des griefs prévue dans les conventions collectives des parties, et plusieurs des plaignants syndiqués ont déposé des réclamations en matière d’obligation de représentation équitable contre leurs syndicats en vertu de la Code des relations de travail alléguant que les syndicats n’ont pas correctement servi leurs intérêts dans la procédure de règlement des griefs. Bien que le juge Farrington n’ait pas commenté le résultat de l’arbitrage ou de diverses plaintes relatives à l’obligation de représentation équitable, il a mis en garde contre le fait qu’une partie tente d’éviter des résultats défavorables dans un lieu en déposant une action dans un autre lieu concernant la même conduite.

Points à retenir : Weber s’applique aux politiques de vaccination en Alberta; Il est possible de se passer des réclamations pour infraction au début du processus de litige

En fin de compte, cette décision fournit une assurance bienvenue aux employeurs dans les lieux de travail couverts par les conventions collectives en Alberta que Weber est toujours la loi du pays et s’applique aux différends entourant la mise en œuvre de politiques de vaccination obligatoire contre la COVID-19 dans les lieux de travail syndiqués de la province. L’arrêt Weber s’applique peu importe si la demande est juridiquement formulée dans le cadre délictuel, comme une violation des normes d’emploi ou des lois sur les droits de la personne ou même en vertu de la Charte.

Bien que cela ait été la tendance dans d’autres provinces, l’Alberta a maintenant emboîté le pas en respectant la compétence exclusive des arbitres du travail sur ces types de conflits dans les lieux de travail couverts par les conventions collectives, et a confirmé que le fait que les différends entourant les politiques de vaccination obligatoire contre la COVID-19 puissent être politiquement chargés ou soulever d’importantes préoccupations stratégiques ne fait pas de ces différends un hors du domaine exclusif d’un arbitre du travail.

Cette décision est également remarquable pour démontrer qu’un employeur confronté à une réclamation civile entourant l’application d’une politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19 dans un lieu de travail syndiqué, ou tout autre différend découlant d’une convention collective, est en mesure de se passer de cette réclamation dès le début du processus de litige. Bien qu’il soit toujours stressant de se faire signification d’une déclaration, il est important d’examine toutes les options disponibles, car il n’est peut-être pas nécessaire de consacrer du temps, des ressources et des frais juridiques à se soumettre au processus de litige typique axé sur le procès, ou même à déposer une défense.

Si vous avez des questions sur l’effet de cette décision et sur la façon dont elle peut s’appliquer à votre entreprise, veuillez contacter le groupe Bennett Jones Employment Services group pour en discuter.

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