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Le délit de « divulgation publique de faits privés » maintenant reconnu en Alberta

20 septembre 2021

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Écrit par Sebastien Gittens, Stephen Burns, Kees de Ridder, Connor Wilson

Dans ES v Shillington2021 ABQB 739 [Shillington], la Cour du Banc de la Reine de l’Alberta a reconnu le délit de divulgation publique de faits privés pour la première fois en Alberta. Cette décision élargit les recours offerts aux demandeurs dans le cadre d’actions liées à la protection de la vie privée, en particulier ceux lorsqu’un défendeur divulgue les renseignements personnels du demandeur, comme des images intimes ou des renseignements financiers.

Signification

En Alberta, la Protecting Victims of Non-Consensual Distribution of Intimate Images Act offre un recours à ceux dont les images intimes sont distribuées sans leur consentement. Toutefois, la Loi ne s’applique pas rétroactivement et ne protège pas les situations où les images sont distribuées en privé.

Bien que Shillington se concentre sur la distribution d’images intimes, le délit civil reconnu par la Cour ne se limite pas à de tels scénarios et peut également s’appliquer à d’autres renseignements sensibles, tels que les dossiers bancaires et les dossiers de santé.

Les faits

Le demandeur et le défendeur ont eu une relation amoureuse pendant 11 ans. Tout au long de leur relation, le demandeur a partagé des images intimes avec le défendeur. Elle l’a fait en comprenant expressement qu’ils ne seraient partagés avec personne. Vers la fin de leur relation, le défendeur a dit au demandeur qu’il avait affiché les images sur divers sites Web périodiquement pendant la majeure partie de leur relation.

La relation a pris fin à la suite d’une agression physique et sexuelle violente. Avec l’aide de l’aumônier militaire, le demandeur a pu s’échapper une fin de semaine alors que le défendeur n’était pas à la maison. Elle s’est enfuie du Nouveau-Brunswick pour l’Alberta avec leurs enfants.

Éléments de la nouvelle responsabilité délictuelle

En établissant le délit de divulgation publique de faits privés, la Cour a adopté le libellé du délit analogue reconnu en Ontario. Le critère du nouveau délit de divulgation publique de faits privés en Alberta est le suivant :

  1. le défendeur a rendu public un aspect de la vie privée du demandeur;
  2. le demandeur n’a pas consenti à la publication;
  3. la publication de l’affaire ou sa publication serait très offensante pour une personne raisonnable dans la situation du demandeur; et
  4. la publication n’était pas d’une préoccupation légitime pour le public.

Il existe des intérêts reconnus en matière de protection de la vie privée dans les aspects financiers et sexuels de la vie, ainsi que dans les dossiers de santé et les relations d’une personne. La liste des domaines privés de la vie n’est pas fermée. Un tribunal peut demander comment une personne raisonnable à la place du demandeur se sentirait face au même niveau de publicité pour déterminer si quelque chose en dehors de la liste est privé et devrait faire l’objet d’un recours.

Dommages-intérêts et recours en vertu du nouveau délit

La Cour a accordé au demandeur une injonction permanente et des dommages-intérêts pécuniaires. Le juge Inglis a exigé que le défendeur fasse de son mieux pour retourner toutes les images du demandeur et pour faire de son mieux pour retirer les images en ligne. Une partie de la raison pour laquelle le défendeur était tenu de retirer les images était qu’elles ne peuvent pas toutes être interceptées par le régime législatif existant et peuvent causer un préjudice supplémentaire au demandeur.

En l’espèce, le traumatisme psychologique grave de la demanderesse est un effet raisonnablement prévisible de la publication en ligne de ses images intimes sans son consentement. Il est à noter qu’il s’agit d’un délit intentionnel et que, par conséquent, le défendeur peut être tenu responsable des conséquences imprévues.

Le juge Inglis a conclu que la conduite du défendeur était répréhensible et a accordé des dommages-intérêts généraux, punitifs, majorés et spéciaux. Bien que d’autres dommages-intérêts aient également été accordés au demandeur, le juge Inglis a accordé ce qui suit relativement aux dommages subis en vertu du délit de divulgation publique de faits privés : (i) 80 000 $ en dommages-intérêts généraux pour la douleur et la souffrance que le demandeur a subies; (ii) 25 000 $ en dommages-intérêts majorés en raison de la malveillance du défendeur et de l’abus de sa position de confiance, et (iii) 50 000 $ en dommages-intérêts punitifs en raison du volume de contenu affiché en ligne. De plus, la demanderesse a reçu 30 000 $ pour couvrir les frais qu’elle a engagés pour déménager et demander un traitement. La Cour a refusé de couvrir la totalité du montant réclamé parce que le lien de causalité entre les dommages-intérêts spéciaux et la conduite délictuelle n’était pas pleinement établi.

Cette décision pourrait avoir une incidence sur les entreprises

Au-delà de la distribution non consensuelle d’images intimes, cette décision peut avoir un impact sur les entreprises, les employeurs et d’autres personnes qui détiennent des informations privées sur les clients ou les clients, telles que des dossiers bancaires ou de santé. L’arrivée de ce délit annonce l’expansion des délits de common law en matière de protection de la vie privée en Alberta et souligne l’importance de prendre des mesures proactives pour protéger les données sensibles.

Si vous souhaitez en savoir plus sur la façon dont cette décision peut affecter votre entreprise, nous vous invitons à contacter les auteurs de cet article de blog, ou les membres de notre groupe Privacy and Data Protection group.

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