Écrit par Radha D. Curpen, Sander A.J.R. Grieve, Sharon G.K. Singh and Zoe Hutchinson
Le 13 décembre 2018, John McKay, député de Scarborough-Guildwood, a présenté le projet de loi d’initiative parlementaire, le projet de loi C-423 : Loi sur l’esclavage moderne (le « projet de loi »), qui vise à mettre en œuvre l’engagement international du Canada à lutter contre l’esclavage moderne. Si le projet de loi est adopté par la Chambre des communes et le Sénat, le projet de loi exigera que certaines entités rendent compte publiquement des mesures qu’elles ont prises pour prévenir et réduire le risque qui a forcé le travail ou le travail des enfants est utilisé dans leur entreprise et dans toute étape de sa chaîne d’approvisionnement.
Il n’existe pas de définition universelle de l’esclavage moderne; cependant, le terme est souvent utilisé pour décrire le travail des enfants, le travail forcé, la traite des êtres humains et d’autres situations impliquant l’exploitation des êtres humains. À l’échelle internationale, les administrations ont commencé à introduire et à mettre en œuvre des lois pour lutter contre les pratiques d’esclavage moderne dans les chaînes d’approvisionnement des produits de consommation vendus dans le pays, y compris au Royaume-Uni, en Australie et dans certaines juridictions des États-Unis.
Nous donnons ci-dessous un aperçu du projet de loi et des leçons que le Canada peut tirer de l’expérience du Royaume-Uni en adoptant des lois similaires. Nous concluons en suggérant les prochaines mesures que les entreprises peuvent prendre en réponse au projet de loi.
Aperçu du projet de loi
Le projet de loi vise à lutter contre deux formes d’esclavage moderne : le travail des enfants et le travail forcé. Le projet de loi définit :
- Le travail des enfants à titre de travail ou de service fourni, ou offert d’être fourni, au Canada par des enfants dans des circonstances qui sont contraires aux lois applicables au Canada ou fournies ou offertes à l’extérieur du Canada dans des circonstances qui, si elles étaient fournies ou offertes au Canada, seraient contraires aux lois applicables au Canada.
- Le travail forcé à titre de travail ou de service fourni, ou offert d’être fourni, par une personne dans des circonstances dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce qu’elle croie que sa sécurité ou celle d’une personne qu’elle connaît serait menacée si elle ne fournissait pas, ou n’offrait pas de fournir, le travail ou le service.
Le projet de loi s’applique à toute entité qui fabrique, produit, cultive, extrait, transforme ou vend des marchandises au Canada ou ailleurs; toute entité qui importe au Canada des biens fabriqués, produits, cultivés, extraits ou transformés à l’extérieur du Canada; ou toute entité qui contrôle une entité décrite ci-dessus. Une entité est définie comme une société ou une fiducie, une société de personnes ou une autre organisation non constituée en personne morale qui :
(a) est cotée en bourse au Canada;
(b) a un lieu d’affaires au Canada, fait des affaires au Canada ou a des actifs au Canada et qui, d’après ses états financiers consolidés, remplit au moins deux des conditions suivantes pour au moins un de ses deux exercices financiers les plus récents:
(i) il a au moins 20 millions de dollars d’actifs,
(ii) il a généré au moins 40 millions de dollars de revenus,
(iii) il emploie en moyenne au moins 250 employés; ou
(c) est prescrit par règlement.
Cette définition est la même que celle d’une entité qui figure dans la Loi sur les mesures de transparence dans le secteur extractif.
Le projet de loi comprend un régime d’inspection et propose de donner au ministre le pouvoir d’exiger d’une entité qu’elle fournisse certains renseignements, comme des renseignements sur :
- la structure de l’entité et les biens qu’elle fabrique, produit, cultive, extrait ou transforme au Canada ou importe au Canada;
- les politiques de l’entité en matière de travail forcé et de travail des enfants;
- les activités de l’entité qui comportent un risque de recours au travail forcé ou au travail des enfants et les mesures qu’elle a prises pour évaluer et gérer ce risque;
- toute mesure prise par l’entité pour remédier au travail forcé ou au travail des enfants; et
- la formation dispensée par l’entité à ses employés en matière de travail forcé et de travail des enfants.
Le projet de loi modifierait le Tarif des douanes pour permettre l’interdiction des produits fabriqués ou produits en tout ou en partie par le travail forcé ou le travail des enfants. Les entités qui ne se conforment pas à certaines dispositions du projet de loi, y compris les dispositions relatives à la déclaration de comptes, seraient coupables d’une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire et passibles d’une amende pouvant aller jusqu’à 250 000 $.
Le projet de loi tel que rédigé stipule que la Loi sur l’esclavage moderne entrera en vigueur le 1er janvier 2020.
La loi britannique sur l’esclavage moderne
La Loi de 2015 sur l’esclavage moderne du Royaume-Uni (la « Loi du Royaume-Uni ») a reçu la sanction royale le 26 mars 2015. La loi du Royaume-Uni regroupe les infractions actuelles relatives à la traite et à l’esclavage. Il crée également deux nouvelles ordonnances civiles pour prévenir l’esclavage moderne; crée un commissaire à la lutte contre l’esclavage; et prévoit la protection des victimes de l’esclavage moderne.
À l’instauration du projet de loi C-423, la Loi du Royaume-Uni comprend une disposition sur la transparence des chaînes d’approvisionnement, en application de laquelle elle impose des obligations de déclaration à certaines entreprises, y compris l’obligation pour ces entreprises de produire une déclaration énonçant les mesures qu’elles ont prises pour s’assurer qu’il n’y a pas d’esclavage moderne dans leur propre entreprise et leurs chaînes d’approvisionnement. Le gouvernement du Royaume-Uni a également publié un « Guide pratique » pour aider les entreprises à se conformer aux obligations de déclaration en vertu de la loi britannique. La loi du Royaume-Uni prévoit des sanctions pour la commission d’infractions liées à l’esclavage et stipule que le Secrétaire d’État peut faire respecter les obligations de déclaration par le biais d’une procédure civile pour une injonction ou, en Écosse, l’exécution spécifique d’une obligation légale.
Cependant, trois ans après l’entrée en vigueur de la loi britannique, il y a eu des critiques quant à son efficacité, y compris le fait que l’application des exigences en matière de rapports a été faible. Lors d’une réunion du Comité des comptes publics du Royaume-Uni en 2018, le ministère de l’Intérieur a confirmé qu’il ne compile pas de liste des entreprises qui devraient faire une déclaration de transparence dans leurs chaînes d’approvisionnement, qu’il n’a pas de liste de celles qui l’ont fait et, surtout, qu’il ne tient pas à jour la base de données.
En outre, le National Audit Office du Royaume-Uni a publié un rapport en décembre 2017 examinant les progrès du ministère de l’Intérieur dans la réduction de l’esclavage moderne. Il a constaté que le Ministère avait établi de bonnes bases, mais que des problèmes administratifs subsistaient. Il s’agissait notamment d’un processus d’aiguillage complexe, d’une qualité inégale des données et d’une faible compréhension du coût des services de soutien aux victimes. En mai 2018, le premier commissaire anti-esclavagiste, Kevin Hyland, a démissionné en invoquant l’ingérence du gouvernement dans son rôle.
La loi australienne sur l’esclavage moderne
Le 10 décembre 2018, l’Australie a promulgué la Loi sur l’esclavage moderne (la « Loi australienne »), qui est entrée en vigueur le 1er janvier 2019. La loi australienne impose une exigence de déclaration similaire à celle de la loi britannique. Il exige que certaines grandes entreprises et d’autres entités en Australie fassent des rapports publics annuels sur leurs actions pour faire face aux risques d’esclavage moderne dans leurs opérations et leurs chaînes d’approvisionnement. Les entités dont le revenu est inférieur à un certain seuil de revenus peuvent se porter volontaires pour se conformer aux exigences de déclaration. Les rapports seront accessibles au public dans un dépôt central.
La loi australienne n’impose pas de pénalité pour défaut de produire une déclaration ou pour avoir déposé une déclaration incomplète. Cet aspect de la législation, entre autres, sera réexaminé trois ans après le début de la loi australienne afin de déterminer si l’imposition de sanctions est nécessaire ou souhaitable.
Réflexions finales
La législation traitant de l’esclavage moderne est un domaine du droit en développement. L’accent croissant et croissant mis par les gouvernements, les citoyens et les entreprises sur la responsabilité sociale des entreprises a placé les conditions dans lesquelles les biens de consommation sont produits et les services fournis sous surveillance.
Les efforts législatifs et stratégiques du Canada pour s’assurer que les entreprises qui ont un lien avec le Canada ne sont impliquées dans aucune atteinte aux droits de la personne, y compris le Bureau de la responsabilité sociale des entreprises de l’industrie extractive et l’Ombudsman canadien pour les entreprises responsables, ont eu un succès et un accueil mitigés. Le promoteur soutient que le projet de loi est une réponse aux efforts internationaux visant à freiner l’esclavage moderne et à mettre en œuvre les recommandations formulées par diverses organisations non gouvernementales.
Que le projet de loi soit adopté ou non, en ce qui concerne la citoyenneté d’entreprise et la gestion de la réputation, les entités impliquées dans la chaîne d’approvisionnement des biens, y compris dans les biens à risque plus élevé tels que l’électronique et le textile, devraient s’assurer qu’elles ont fait preuve d’une diligence raisonnable adéquate à l’égard des personnes impliquées dans leur chaîne d’approvisionnement et des pratiques mises en œuvre par ces entités.
Communiquez avec votre conseiller juridique de Bennett Jones pour discuter des méthodes de mise à l’essai et de mise en œuvre de mesures de gouvernance solides, y compris l’élaboration de politiques et de programmes de formation pour gérer les risques, évaluer l’exposition et s’assurer contre les réclamations liées au travail forcé ou au travail des enfants.
Le projet de loi C-423, qui a récemment franchi l’article de la première lecture à la Chambre des communes le 13 décembre 2018, devra passer par les deuxième et troisième lectures à la Chambre des communes, ainsi que par les première, deuxième et troisième lectures au Sénat, et recevoir la sanction royale, afin de devenir loi. Les lecteurs sont avertis que le chemin vers le droit est généralement difficile pour les projets de loi d’initiative parlementaire.
Traduction alimentée par l’IA.
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