Écrit par James Beeby, Radha Curpen, Sharon Singh and Brienne Gloeckler
Le 26 septembre 2023, la Cour suprême de la Colombie-Britannique a rendu une décision dans l’affaire Gitxaala v. British Columbia (Chief Gold Commissioner) qui aura une incidence sur l’avenir de l’exploitation minière en Colombie-Britannique. En l’espèce, la Cour a conclu que l’administration du régime foncier minier de la province violait l’obligation de la Couronne de consulter les peuples autochtones. La décision exige que la province modifie son système de revendications minérales pour remédier au manque de consultation des peuples autochtones avant l’octroi d’un claim minier ; quelque chose que la province était déjà en train d’aborder.
Il s’agit notamment de la première décision judiciaire à examiner l’effet juridique de la Declaration on the Rights of Indigenous Peoples Act (DRIPA) de la Colombie-Britannique depuis l’entrée en vigueur de la loi en 2019. La Cour a conclu que la DRIPA n’intègre pas la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (DNUDPA) dans le droit interne, ni ne crée de droits justiciables.
En fin de compte, le jugement reconnaît l’importance de la négociation comme voie vers la réconciliation. Le juge Ross a reconnu que les peuples autochtones et l’industrie de l’exploration minière sont « là pour rester » et que les deux doivent trouver un moyen de coexister grâce à un système de tenure minière qui protège les droits des Autochtones.
Régime de tenure minière de la Colombie-Britannique
Les claims miniers en Colombie-Britannique sont réglementés par la Mineral Tenure Act (la MTA). Le commissaire en chef de l’or (le commissaire) est habilité, en vertu de la MTA, à créer et à administrer le régime foncier minier de la province. Dans le système actuel, toute personne peut obtenir un certificat de mineur gratuit en remplissant un formulaire en ligne et en payant des frais.
Le titulaire d’un certificat de mineur libre peut alors enregistrer électroniquement un claim minier sur certaines terres de la Couronne, y compris les terres assujetties à des droits ancestraux revendiqués, qui ne font pas l’objet d’un claim minier préexistant ou d’une réserve « sans jalonnement ». Le claim minier est automatiquement accordé au mineur. Il n’y a pas de consultation ou d’avis aux peuples autochtones touchés lorsqu’un claim minier est enregistré. Le titulaire du claim se voit accorder divers droits, y compris le droit exclusif d’explorer et de posséder les minéraux qui existent dans la zone du claim. Toutefois, un permis en vertu de la Loi sur les mines est requis pour les activités d’exploration qui comportent des perturbations mécaniques, y compris le forage exploratoire, l’excavation, le traitement, la concentration, l’élimination des déchets et la remise en état des sites. La consultation a lieu lorsque, et si, le mineur demande l’approbation de la Loi sur les mines.
Allégations des requérants
Dans cette affaire, les requérants, la Nation Gitxaala et la Première Nation Ehattesaht, ont affirmé que l’octroi de claims miniers en vertu de la MTA :
- viole l’obligation constitutionnelle de la Couronne de consulter en permettant l’enregistrement automatique des claims sans consultation, le système de tenure minière. Par conséquent, les requérants ont fait valoir que l’ATM n’est pas correctement mis en œuvre ou, à titre subsidiaire, que l’ATM n’est pas valide sur le plan constitutionnel ; et
- est incompatible avec les droits reconnus dans la DNUDPA et la DRIPA. En conséquence, les requérants ont demandé un jugement déclaratoire ou une injonction en plus de l’annulation de plusieurs claims miniers accordés sur leur territoire revendiqué.
La décision
Les revendications minières déclenchent l’obligation de consulter
La Cour a conclu que l’obligation de consulter de la Couronne avait été déclenchée par l’émission de claims miniers en vertu du régime actuel de tenure minière. L’obligation de consulter prend naissance lorsque la province envisage une conduite qui pourrait avoir une incidence préjudiciable sur un droit ancestral, y compris le titre ancestral revendiqué. En l’espèce, les effets préjudiciables suivants ont déclenché l’obligation :
- les effets négatifs des claims miniers sur les zones qui sont culturellement et spirituellement importantes pour les pétitionnaires ; et
- les effets préjudiciables des revendications minières sur les droits des requérants de posséder les minéraux qui existent sur leur territoire revendiqué et d’en tirer un avantage financier.
Toutefois, la Cour a conclu que l’obligation n’avait pas été déclenchée par les répercussions des claims miniers sur les systèmes juridiques ou de gouvernance traditionnels des requérants. Les requérants alléguaient que l’octroi de claims miniers sur leurs territoires revendiqués avait eu une incidence négative sur leurs droits ancestraux de gérer les terres et de décider de la façon dont les terres seront utilisées. Le juge Ross a conclu qu’un effet préjudiciable de la conduite de la Couronne doit être incompatible avec l’exercice actuel des droits ancestraux pour déclencher l’obligation de consulter. Comme ni l’un ni l’autre des requérants ne détenait de titre ancestral reconnu, l’octroi de claims miniers n’a pas eu d’incidence négative sur l’exercice actuel des droits de gouvernance des titres ancestraux. La Cour a déclaré ce qui suit :
...[L]'obligation de la Couronne est d’administrer les territoires jusqu’à ce que le titre ancestral soit réglé. Le rôle de la province est de préserver les territoires de manière à ce que chaque Première nation puisse exercer ses droits de titre ancestral après le règlement du titre ancestral.
Il s’ensuit que la province qui administre le territoire (à l’heure actuelle) d’une manière qui n’est pas conforme au système de droit, de gouvernance ou de gestion des Premières Nations, ne crée pas d’impact négatif qui déclenche une consultation (fondée uniquement sur ces droits). Pour que l’obligation de consulter soit déclenchée, la conduite contestée de la Couronne doit, d’une façon ou d’une autre, entraver la capacité des requérants de gouverner leurs terres à l’avenir, lorsque le titre de propriété sera établi. Les requérants font seulement valoir que leur capacité de gouverner à l’heure actuelle est entravée. Comme je l’explique plus loin, ce n’est pas le type d’effet préjudiciable envisagé par le critère haïda.
La MTA est valide sur le plan constitutionnel, mais son administration viole les obligations de la Couronne
La Cour a conclu que l’administration de l’ATM était incompatible avec l’obligation de consulter. Toutefois, la Cour n’a pas jugé que la loi elle-même était inconstitutionnelle. Le commissaire, l’entité responsable de la mise en œuvre du régime de tenure minière de la Colombie-Britannique, a été jugé avoir l’autorité et le pouvoir discrétionnaire nécessaires en vertu de la MTA pour créer un système qui permettait la consultation préalable à l’enregistrement. Ainsi, la MTA elle-même est constitutionnellement valide. Le fait que le commissaire n’exige pas de consultation avant d’accorder un claim minier constituait plutôt un manquement aux obligations de consultation de la Couronne.
La DRIPA ne met pas en œuvre la DNUDPA dans le droit interne
La Cour a conclu que l’article 2 de la DRIPA ne met pas en œuvre la DNUDPA dans le droit interne de la Colombie-Britannique. Les requérants alléguaient que les droits reconnus dans la DNUDPA faisaient partie de la loi de la Colombie-Britannique en vertu de l’article 2 de la DRIPA.
Cette disposition énonce l’objet de la loi, dont l’un est « d’affirmer l’application de [la DNUDPA] aux lois de la Colombie-Britannique ». Le juge Ross a conclu que pour que le droit interne mette en œuvre un instrument international, il faut plus qu’un énoncé général des objectifs. Il a été jugé que le libellé de l’article 2 n’était qu’une déclaration large et télénelle qui ne suffisait pas à elle seule à créer des droits et des obligations de fond. Le juge Ross a toutefois utilisé l’article 2 comme aide à l’interprétation des autres dispositions de la DRIPA.
La conformité des lois de la Colombie-Britannique avec la DNUDPA n’est pas justiciable en vertu de la DRIPA
La Cour a également statué que l’article 3 de la DRIPA n’exige pas que le tribunal statue si les lois de la Colombie-Britannique sont conformes à la DNUDPA. L’article 3 prévoit que le gouvernement doit « prendre toutes les mesures nécessaires pour s’assurer que les lois de la Colombie-Britannique sont conformes » à la DNUDPA en « consultation et coopération » avec les peuples autochtones de la Colombie-Britannique. La Cour a rejeté la proposition des requérants selon laquelle le libellé de l’article 3 invoque une décision judiciaire dans tous les cas où les lois de la Colombie-Britannique peuvent être incompatibles avec la DNUDPA. La Cour a plutôt conclu que la détermination des lois qui sont incompatibles avec la DNUDPA nécessite une consultation et une coopération entre le gouvernement et les peuples autochtones.
Par conséquent, la Cour a rendu un jugement déclaratoire selon lequel la mise en œuvre de l’ATM par le commissaire, dans la mesure où elle permet l’enregistrement automatique des claims miniers sans consultation, viole l’obligation de consulter de la Couronne. La déclaration est suspendue pour une période de 18 mois afin de donner à la province le temps de mettre en œuvre un régime qui permet la consultation ou de modifier l’ATM elle-même. La demande de injonction a été rejetée.
Regard vers l’avenir
Le 25 octobre 2023, la Nation Gitxaala a déposé un avis d’appel devant la Cour d’appel de la Colombie-Britannique (l’avis) relativement à la décision. L’avis fait appel des conclusions de la Cour suprême concernant la DRIPA, la suspension de la déclaration et le refus d’une injonction. La Nation Gitxaala sollicite des déclarations, notamment que :
- La DNUDPA s’applique à toutes les lois de la Colombie-Britannique ;
- la cohérence des lois de British Colubmia et de la DNUDPA est justiciable ;
- le régime actuel de revendications minérales n’est pas conforme à la DNUDPA ;
- la province a l’obligation légale de consulter la Nation Gitxaala et de coopérer avec elle au sujet des mesures nécessaires pour harmoniser le régime actuel des revendications minières avec la DNUDPA ; et
- il est interdit au commissaire d’autoriser l’enregistrement de tout claim minier sur des terres que la Nation Gitxaala a revendiquées sans avoir d’abord consulté Gitxaala.
Bien que cette décision ait des répercussions importantes sur l’industrie minière de la Colombie-Britannique, la province s’était déjà engagée à examiner et à réformer l’ATM en consultation et en collaboration avec les Premières Nations et les organisations autochtones. La province a initialement lancé un processus d’examen en 2018 et s’est réengagée dans le processus dans son discours du Trône de 2022.
La décision nécessite, à tout le moins, un changement de procédure à l’octroi des claims miniers : une consultation préalable à l’enregistrement avec les peuples autochtones. Toutefois, la province peut chercher à mettre en œuvre d’autres changements de procédure ou à apporter des changements de fond dans le cadre des efforts visant à harmoniser les lois provinciales avec le Plan d’action de la DRIPD et le point de vue de la province sur la DNUDPA. Les questions liées à la confidentialité, à la propriété intellectuelle et aux aspects pratiques de l’industrie de l’exploration minière de la province devront être prises en compte lors de la conception d’un régime qui permet à la province de respecter ses obligations et ses engagements tout en positionnant la Colombie-Britannique pour tirer parti de l’économie mondiale propre émergente.
Bien que la décision accorde à la province 18 mois pour apporter des modifications, le gouvernement actuel pourrait prendre des mesures plus tôt, d’autant plus que la MTA contient des outils que la province peut utiliser pour harmoniser le système de claims miniers avec la décision. Entre-temps, l’industrie, le gouvernement et les collectivités autochtones de la Colombie-Britannique doivent se préparer adéquatement aux changements à venir.
Traduction alimentée par l’IA.
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