Écrit par Philip Ward, Andrew Young, Matthew Hunt et Doug Scully
sociétés de capital-investissement jouent un rôle essentiel dans la revitalisation des entreprises en difficulté en fournissant, entre autres, un soutien financier et une expertise opérationnelle. Les opérations de capital-investissement sont souvent motivées par une combinaison d’objectifs de croissance stratégique et de possibilités de planification fiscale.
Au Canada, l’acquisition d’entreprises en difficulté peut déboucher sur de précieux avantages fiscaux, comme la possibilité d’utiliser les reports non liés à des pertes en capital pour compenser le revenu d’entreprise futur. Ces acquisitions sont régies par des cadres réglementaires stricts conçus pour prévenir les abus et assurer la conformité à la Loi de l’impôt sur le revenu (Canada) (LIR). Bien qu’il soit possible pour les sociétés de capital-investissement d’utiliser les précieux attributs fiscaux des entreprises en difficulté, une planification minutieuse et une compréhension fondamentale des lois fiscales pertinentes sont nécessaires.
Le régime fiscal fédéral du Canada, contrairement à de nombreux autres pays, ne permet pas à un groupe de sociétés liées de produire ses déclarations de revenus sur une base consolidée, ce qui signifie que les pertes ne peuvent pas simplement être partagées au sein d’un groupe de sociétés de droit. Chaque personne morale est imposée séparément et ne peut pas, par défaut, utiliser les pertes d’une autre entité, qu’elle soit affiliée ou non. Cependant, certaines stratégies sont disponibles et ont été acceptées par les autorités fiscales canadiennes pour permettre l’utilisation des pertes au sein d’un groupe affilié. De plus, les règles fiscales du Canada permettent à un acheteur d’utiliser les pertes fiscales d’une cible dans certaines circonstances limitées visant à faciliter le redressement des entreprises en difficulté.
L’acquisition du contrôle et ses répercussions
Il existe des règles de « restriction des pertes » qui visent à empêcher la « négociation de pertes » sans lien de dépendance au Canada. Ces règles sont déclenchées lors d’un « événement de restriction des pertes » qui se produit lorsqu’un acheteur acquiert le contrôle d’une cible non liée. De façon générale, une acquisition de contrôle se produit lorsque le contrôle de jure d’une société est acquis, c’est-à-dire que la propriété d’un nombre suffisant d’actions a été acquise pour accorder à l’acquéreur, ou à un groupe de personnes dont il fait partie, la capacité d’élire la majorité des membres du conseil d’administration. La survenance d’un événement lié à la restriction des pertes entraîne :
- une fin d’année d’imposition réputée à la cible;
- une cristallisation des pertes en capital accumulées mais non réalisées de la société cible immédiatement avant l’acquisition du contrôle (au moyen d’une dépréciation obligatoire à la juste valeur marchande de l’assiette fiscale de la société cible en immobilisations);
- la capacité de choisir de déclencher des gains accumulés sur des immobilisations, qui peuvent être protégés par des pertes qui expireraient autrement, et ainsi augmenter l’assiette fiscale de la cible sur le bien;
- certaines restrictions et interdictions sur l’utilisation des pertes en capital antérieures à l’acquisition après l’acquisition du contrôle, y compris l’expiration des pertes en capital nettes antérieures à l’acquisition et des pertes en capital provenant de biens qui n’ont pas été utilisés autrement. Les pertes d’entreprise antérieures à l’acquisition peuvent généralement être reportées, à condition que la société visée exploite la même entreprise qui a donné lieu aux pertes à des fins lucratives ou avec une attente raisonnable de profit tout au long de l’année d’imposition au cours de laquelle les pertes sont utilisées, et à condition que les pertes ne puissent être utilisées que pour mettre à l’abri le revenu de la même entreprise ou d’une entreprise similaire.
Ces règles visent à établir un équilibre entre la prévention des pertes au Canada et le découragement de l’acquisition et du redressement d’entreprises en difficulté.
Stratégies de répartition et de préservation des pertes
Les tentatives de contourner les règles de restriction des pertes de la LIR sont étroitement surveillées par l’Agence du revenu du Canada (ARC) et les tribunaux canadiens. En particulier, un certain nombre de décisions judiciaires récentes, y compris la décision de la Cour suprême dans l’affaire Deans Knight, ont fermé la porte à certaines stratégies conçues pour éviter les règles de restriction des pertes. L’ARC a toutefois accepté certaines stratégies d’utilisation des pertes, qui peuvent être mises en œuvre avec succès en respectant les lignes directrices énoncées dans les politiques de l’ARC et la jurisprudence canadienne.
Dans le cas d’une acquisition d’une entreprise en difficulté, le fait de savoir quelles pertes et autres attributs fiscaux survivront à l’acquisition du contrôle, par rapport à ceux qui expireront, peut avoir une incidence importante sur les modèles financiers. Si l’acquisition en difficulté comprend la restructuration ou la compromission d’une dette, l’incidence des règles canadiennes sur l’annulation de la dette sur les pertes fiscales et d’autres attributs doit être prise en compte et gérée dans la mesure du possible. Dans l’éventualité où il y aurait des pertes qui expireraient autrement, on peut envisager la possibilité de choisir de déclencher des gains accumulés sur les actifs de la cible et d’augmenter ainsi l’assiette fiscale de ces actifs.
À la suite d’une acquisition de contrôle, l’acheteur et la cible feront généralement partie d’un groupe de sociétés affiliées. Bien que les pertes ne puissent pas être transférées de plein droit au sein d’un groupe de sociétés affiliées, le régime fiscal canadien permet aux sociétés d’un groupe de sociétés affiliées de compenser certains gains d’une société avec certaines pertes d’une autre société, à condition qu’elles exercent leurs activités dans les limites prescrites par la loi et l’ARC.
La fusion ou la liquidation d’une société ayant des pertes fiscales (Lossco) en une société rentable affiliée (Profitco) à imposition différée permet de conserver les pertes autres que des pertes en capital (sous réserve des exigences de poursuite d’activité décrites ci-dessus dans le cas des pertes antérieures à l’acquisition). Les transferts d’actifs de Profitco à une société affiliée peuvent, sous réserve de certaines limites, être effectués à l’abri de l’impôt, ce qui permet aux pertes accumulées de Lossco de mettre à l’abri le revenu ou les gains sur les actifs transférés.
Lessociétés de capital-investissement peuvent maximiser la valeur des pertes à échéance par la vente d’actifs ou les déductions différées pour s’assurer que les avantages fiscaux ne sont pas gaspillés.
Pour profiter des pertes autres que les pertes en capital d’une société affiliée, Profitco peut conclure une opération de « boucle d’endettement » avec la société Lossco dans le cadre de laquelle :
- Profitco emprunte de l’argent à un prêteur sans lien de dépendance (p. ex., une banque) pour souscrire des actions de Lossco;
- Lossco utilise le produit de la souscription d’actions pour prêter de l’argent à Profitco avec intérêts;
- Profitco utilise l’argent emprunté à Lossco pour rembourser l’argent emprunté à la banque.
Cette stratégie se traduit par (1) la création d’un revenu d’intérêts imposable dans Lossco, qui est à l’abri des pertes de Lossco, et (2) la création d’une déduction d’intérêts correspondante dans Profitco qui est utilisée pour compenser le revenu de Profitco.
Bien que l’ARC ait approuvé cette stratégie, il faut veiller à ce que l’opération respecte les paramètres spécifiquement approuvés par l’ARC. Par exemple, Profitco doit être en mesure de prétendre légitimement avoir emprunté de l’argent à des fins lucratives.
En mettant en œuvre ces stratégies et d’autres, les sociétés de capital-investissement peuvent optimiser l’efficacité fiscale tout en respectant les exigences fiscales canadiennes. Cependant, une bonne planification est essentielle pour naviguer dans le système complexe de règles fiscales et préserver les attributs fiscaux précieux.
Limites et risques
En pratique, le respect des règles de restriction des pertes dans le cadre d’une acquisition exige que les sociétés de capital-investissement conservent et continuent d’exercer les activités commerciales de base de la société acquise avec une attente raisonnable de profit. Les pertes ne peuvent compenser que le revenu provenant de l’entreprise acquise et des activités similaires à celles effectuées avant l’acquisition. Si un changement opérationnel important se produit, comme l’arrêt de secteurs d’activité clés, l’ARC peut interdire l’utilisation de pertes reportées, quelle que soit la rentabilité. Par conséquent, la continuité des activités et l’intention de conserver les activités principales de la cible sont nécessaires.
À la suite de la décision de la Cour suprême du Canada dans l’affaire Deans Knight, les sociétés de capital-investissement devraient se méfier des stratégies visant à contourner les règles sur l’acquisition de contrôle. Les tentatives de contournement de ces règles, ou les opérations où l’obtention d’avantages fiscaux semblent être le seul ou le principal moteur, justifieront l’examen de l’ARC. Cela dit, les règles sur l’acquisition de contrôle, ainsi que la jurisprudence canadienne et les commentaires de l’ARC, fournissent des objectifs importants aux sociétés de capital-investissement.
Les sociétés de capital-investissement qui mettent en œuvre des stratégies d’utilisation des pertes doivent également connaître la règle générale anti-évitement (RGAÉ) de la LIR, dont la portée a été élargie en 2023 et qui comprend maintenant une pénalité potentielle importante. L’ARC peut refuser des avantages fiscaux si une opération est structurée principalement pour accéder à des pertes fiscales sans intention commerciale légitime. Bien que la RGAÉ n’interdise pas les acquisitions et la planification fiscalement avantageuses, elle exige que les transactions démontrent une substance économique évidente au-delà des avantages fiscaux immédiats.
De plus, les sociétés de capital-investissement doivent savoir que la présence dans une transaction de certains signes distinctifs, notamment les honoraires conditionnels, la protection confidentielle et la protection contractuelle (y compris certaines indemnités), peut donner lieu à une déclaration en vertu des règles sur les opérations à déclarer qui ont été introduites en 2023.
Lessociétés de capital-investissement ont une occasion unique de tirer parti des avantages fiscaux grâce à des acquisitions stratégiques, mais ces gains nécessitent une navigation attentive des règles fiscales applicables. Une bonne planification, une bonne conformité et l’accent mis sur une véritable intention commerciale permettront aux entreprises de réaliser ces avantages de manière responsable et de minimiser l’examen des transactions par l’ARC.
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